L’Association des Chercheurs des Organismes de la Formation et de l’Intervention Sociales et l’École Supérieure de Travail Social sont heureux de vous inviter au séminaire :
Vers une police des jeunes ?
Alain Vulbeau – Sociologue – Équipe « Crise, École, Terrains sensibles », CREF – Université Paris Ouest Nanterre La Défense
Résumé de l’intervention
Le concept de « police des jeunes » recouvre deux orientations distinctes mais non exclusives du contrôle social. Premièrement, c’est une façon de spécifier l’activité de l’institution policière en direction des jeunes. Cette police des jeunes, au sens spécifique, n’est pas univoque. On a pu repérer, dans une période récente, une « police de proximité » dont une partie des interventions empruntait ses activités aux registres sociaux ou éducatifs (animation, insertion, prévention). Deuxièmement, de façon plus extensive, la police des jeunes, désigne le gouvernement et l’organisation de cette catégorie d’âge. Le maintien de l’ordre en constitue une activité centrale dont l’outillage répressif intègre désormais les armes non-létales, les drones, etc… La police de jeunes, au sens extensif, traduit une porosité inverse où le paradigme répressif gagne les institutions, notamment éducatives et sociales, par la mise en oeuvre de techniques de repérage, de contrôle et de surveillance. Dans ces deux orientations, la régulation urbaine s’avère une fonction transversale et un enjeu populationnel, affichant le portrait d’une jeunesse, « située » aux plans social et spatial. La notion de répression constitue le principe organisateur de cette police des jeunes, qu’elle soit spécifique ou extensive. Cette répression se déploie à travers différents processus de mise à distance matériel, physique et symbolique, comme la rupture, le dégagement et la défiguration. Ces processus de distanciation ne relèvent pas des seules politiques publiques et d’un programme gouvernemental mais d’une action publique, projetée par des acteurs hétérogènes mais cohérents dans l’élaboration d’une gouvernementalité répressive de la jeunesse. Si certains groupes juvéniles sont plus spécialement exposés à ces processus, on peut faire l’hypothèse que la police des jeunes est une expérimentation répressive qui ne demande qu’à s’étendre, en amont et en aval, à d’autres catégories d’âge.
Texte de l’intervention
Cette intervention est reprise dans le chapitre d’ouvrage édité sous la direction de Manuel Boucher “Penser les questions sociales et culturelles contemporaines : Quels enjeux pour l’intervention sociale ?” (Lire l’article)