La résignation et le sentiment d'abandon des habitants des quartiers populaires
Mardi 18 octobre 2011 à 17h
Laurent Courtois
L’Association des Chercheurs des Organismes de la Formation et de l’Intervention Sociales et l’Institut Régional Supérieur du Travail Éducatif et Social et Bourgogne sont heureux de vous inviter au séminaire :
La résignation et le sentiment d’abandon des habitants des quartiers populaires
Résumé de l’intervention
L’ouvrier, le « précaire du tertiaire », « le jeune », le bénéficiaire du RSA, le chômeur, la « petite retraite » sont les acteurs ordinaires de territoires qui n’intéressent plus vraiment la République. Nommer ces territoires c’est se risquer à les stigmatiser. Ils sont les banlieues, les quartiers populaires de villes industrielles devenues un univers de pauvreté. Si tous les habitants ne sont pas pauvres, ils côtoient la pauvreté et se définissent subjectivement comme des pauvres, par rapport aux autres catégories sociales qui vivent en dehors du quartier. Les gens du monde populaire sont plus parlés qu’ils ne parlent. Ils sont les fantômes de ces territoires qui sont majoritairement évoqués par la sous-culture des jeunes, par les problématiques de déviance et de désorganisation. Pourtant les habitants des quartiers populaires sont en majorité des adultes, des gens normaux, qui travaillent, vivent en couples. Ce n’est pas une population homogène, encore moins une communauté. Nombre de ces quartiers sont touchés par l’insécurité et l’isolement social. Ils sont confrontés à un processus de ghettoïsation de plus en plus prégnant. Dans cette logique d’action, ces adultes s’accordent à dire que la meilleure façon d’agir c’est de se taire. Ce leitmotiv, ils l’expliquent par le sentiment d’abandon de la société, des acteurs politiques et des acteurs institutionnels, police, école, travail social, devant qui s’érigent un mur de défiance. Plus qu’une colère, c’est une forme de résignation que nous retrouvons dans les propos et les comportements des habitants des quartiers populaires. La fatigue, l’abattement, le mécontentement, le découragement, l’ennui, l’épuisement, l’usure imprègnent le langage des adultes des quartiers populaires. L’inquiétude et l’indifférence se manifestent, comme pour tenir à distance les injonctions de mobilisation par la participation, suggérée par les politiques d’enpowerment. La résignation tend à devenir une posture de protection face à l’illusion de lendemains meilleurs vantée par les dispositifs d’égalité des chances, qui gomment une possible égalité de places. L’écart se creuse entre les quartiers populaires et les autres territoires urbains, amenant les habitants à se fabriquer des modes de vies à partir d’une résignation et d’un sentiment d’abandon, au sein d’une forme d’organisation sociale spécifique. Le vide politique s’y diffuse amplifiant le sentiment d’avoir été lâché par le Politique.